En Belgique, tout comme dans le reste de l’Europe, l’inflation (hausse du niveau général des prix à la consommation) n’a cessé d’augmenter tout au long de 2010. Pour atteindre une hausse de 2,2 % en moyenne. Les dernières prévisions du Bureau fédéral du Plan confirment cette augmentation pour 2011 : l’inflation moyenne devrait être supérieure à 2,5%, en Belgique, au cours des douze prochains mois. Elle atteindrait même 3,05 % en février prochain ! Un niveau supérieur à ce qui est attendu dans la plupart des autres pays européens.
Cette hausse soutenue du niveau des prix est préoccupante. Car elle menace directement le pouvoir d’achat des familles, des travailleurs. Pour autant, l’inflation reste aujourd’hui presque moitié moins élevée que le niveau observé en 2008 : 4,49 % en moyenne annuelle, et même 5,91 % en juillet 2008, soit le plus haut niveau atteint dans notre pays depuis 25 ans! Ce regain d’inflation ne signifie cependant pas que les prix de tous les produits et services consommés par la plupart des ménages du pays ont augmenté.
Le niveau d’inflation élevée constaté ces quelques derniers mois s’explique surtout par un accroissement continu des prix des trois familles de produits suivantes :
- Produits pétroliers. Raisons principales : le prix du baril vient de dépasser les 90 dollars (son plus haut niveau depuis deux ans) tandis qu’à l’entame de l’hiver, dans les pays industrialisés, on constate toujours une hausse des volumes consommés…ce qui a immédiatement pour effet de faire grimper les prix des produits pétroliers.
- Tarifs énergétiques (gaz, mazout de chauffage et électricité). Ils représentent le facteur principal de l’inflation en Belgique en 2010 (+ 10 % en un an!). Cette augmentation significative s’explique d’une part, par le fait que nous sommes en hiver (volumes consommés à la hausse), et d’autre part, parce que les instances de régulation et de contrôle des prix de l’énergie - entre autres la CREG*-, sont particulièrement inefficaces en Belgique…ce qui tend à en faire un des pays européens où les tarifs de l’énergie sont les plus élevés.
- Matières premières et produits alimentaires. Cela, en raison surtout de la spéculation financière sans précédent qui caractérise les marchés mondiaux des céréales, du sucre, du lait, etc. Un phénomène détestable qui a pour conséquence immédiate de faire monter les prix des produits alimentaires transformés, prêts à la consommation (pain, pâtes, produits lactés, biscuits, etc.). Notons qu’en décembre (2010), les prix alimentaires mondiaux ont atteint un record absolu, supplantant les pics observés en 2008, quelques mois après que la crise économique et financière mondiale ait débuté. De nouveaux records devraient malheureusement être à nouveau atteints en 2011.
Quelles conséquences directes pour les travailleurs ?
A bien des égards, le retour de l’inflation au-delà du seuil des 2 % est évidemment une mauvaise nouvelle. Singulièrement pour les allocataires sociaux (pensionnés, chômeurs, bénéficiaires du revenu d’intégration sociale) et les bas salaires qui consacrent une part conséquente de leurs revenus au logement, à l’énergie et à l’alimentation. La situation socioéconomique de ces catégories de citoyens risque donc encore de s’aggraver dans les prochains mois.
Toutefois, parce que l’inflation est repartie à la hausse tout au long de 2010, en raison de l’existence même de l’indexation des salaires, allocations sociales et loyers (à nouveau en hausse), l’indice-pivot (actuellement à 114,97) devrait être dépassé en juillet 2011. En d’autres termes, cela signifie que les allocations sociales et les salaires dans la fonction publique seront augmentés automatiquement de 2 % (respectivement en août 2011 et septembre 2011). Mais ces indexations ne compensent que partiellement, et a postériori, les hausses successives du coût de la vie. D’autant que depuis mai 2009, l’indice des prix à la consommation a évolué plus vite que l’indice-santé...un écart entre l’évolution du coût de la vie et celle des revenus qui s’avère défavorable pour les travailleurs, pour les ménages en général. Dit autrement, pour les travailleurs du secteur privé, si des conventions prévoyant une augmentation significative des salaires ne peuvent être signées dans les secteurs et les entreprises, la perte du pouvoir d’achat pour ces derniers sera effective dans les mois qui viennent. Sauf si un accord interprofessionnel « généreux », autorisant des hausses salariales conséquentes, intervient sous peu (pour 2011 et 2012). On peut toujours rêver.
Or, en 2011, une mauvaise nouvelle ne venant jamais seule, les ménages et les travailleurs du pays devront faire également à des hausses de tarifs dans les postes budgétaires suivants : 1) Télécommunications. Depuis le 1er janvier, presque tous les opérateurs télécoms actifs en Belgique ont annoncé des augmentations tarifaires (téléphonie fixe et mobile, internet, etc.). Des hausses certes minimes mais qui ne seront pas de nature à diminuer l’écart entre la Belgique et le restant de l’Europe (où, en moyenne, les tarifs des télécoms restent sensiblement inférieurs). 2) Assurances. Etant donné que l’ensemble des compagnies d’assurances ont été amenées à régler un nombre de sinistres particulièrement élevé en 2010 (sinistres et réparations RC Auto ; nombreuses indemnisations liées à des événements climatiques « exceptionnels » tels que la tempête de juillet, les inondations de novembre ou encore les chutes de neige record de décembre), elles ont d’ores et déjà fait savoir qu’elles augmenteraient les primes en conséquence, pour 2011. 3) Transports. Notons que voyager en bus (TEC : + 6 % en moyenne !), ou en train (SNCB : + 1,24 % d’augmentation moyenne des prix des trajets), coûtera aussi plus cher qu’en 2010. Et ce, à partir du 1er février 2011.
Ce sont autant de hausses de prix qui feront mal au budget de nombreuses familles du pays ! Cela, en attendant les mesures d’austérité qui pendent au nez des contribuables. Car, tôt ou tard, il faudra se résoudre à désendetter effectivement les institutions publiques belges. Mais chaque chose en son temps. Car, pour cela, il faudrait d’abord qu’un gouvernement soit constitué au Fédéral. Ce qui est, pour l’heure, loin d’être acquis.
Stéphane Balthazar
Economiste à la Form'action André Renard