Le samedi 20 octobre 2007, les métallos de Verviers fêteront leurs 125 ans d’existence. L’occasion, pour Rouge Métal, de revenir dans les grandes lignes sur une histoire syndicale riche et combative. Et de détailler les festivités prévues dans la cité lainière.
Si c’est bien en 1882 que s’est officiellement créée l’Association des Mécaniciens et Métallurgistes de Verviers et environs, elle n’est pas née sans quelques fondements plus anciens encore. S’il est besoin de le rappeler, les conditions de travail du prolétariat verviétois n’avaient rien à envier à ce qui faisait le quotidien de l’ouvrier au XIXe siècle : plus de la moitié des 24 heures qui font une journée se passait à l’usine, des salaires de misère contraignaient femmes et enfants à seconder époux et pères, l’hygiène était déplorable et la santé en pâtissait.
L’Association Internationale des Travailleurs (AIT), encore dénommée la 1ère internationale, allait servir de cadre, à la fin des années 1860, à la constitution en Belgique de sociétés de résistance des métallos.
Il est significatif de relever que la première de ces sociétés fut créée en 1868 par des métallos verviétois. L’Alliance des Ouvriers Fondeurs de Verviers se constitua le 5 décembre. Elle fut rejointe notamment par la Caisse de résistance des Ouvriers Mécaniciens de Verviers et environs qui, dès 1871, lança une action d’envergure pour obtenir la réduction de la journée de travail de 12 heures à 10 heures. Les divisions idéologiques au sein de l’AIT qui prônait une révolution sans cesse remise au lendemain et la conviction que l’obtention de la journée de 10 heures brisait toute nécessité de poursuivre la lutte plongèrent le mouvement métallo dans une profonde léthargie. Elle dura près de 10 ans.
Le début des années 1880 sonne le réveil des métallos verviétois avec l’Association des Mécaniciens et Métallurgistes de Verviers et environs. En son nom, Gustave Lewalle présente un cahier de revendications à la Commission d’enquête sur le travail industriel mise sur pied en 1886 par le gouvernement de l’époque. La journée de 8 heures est réclamée. La même année naît la Fédération nationale des Métallurgistes dont les organisations adhérentes ont l’obligation de s’affilier collectivement au Parti Ouvrier Belge (P.O.B), lui-même fondé en 1885.
L’affiliation à la Fédération nationale divisa les Verviétois. Une minorité décida de s’y plier en créant la Chambre syndicale des Métallurgistes de Verviers et environs. L’Association des Mécaniciens et Métallurgistes ne s’y résolut qu’en 1893 sous la contrainte du P.O.B. qui imposa à tous les syndicats qui lui étaient affiliés de faire partie de leur fédération.
1893 fut encore une année essentielle pour le mouvement syndical en raison de la grève générale décrétée par le POB pour le suffrage universel. Verviers se dota alors d’un Syndicat des Ouvriers Fondeurs et d’un Syndicat des Chauffeurs Machinistes. Ils rejoignaient ainsi les Mécaniciens. Toujours en 1893 fut créée la Fédération des Métallurgistes de la Vallée de la Vesdre qui prit l’année suivante le nom d’Association des groupes de la Métallurgie de la vallée de la Vesdre.
Le nombre des affiliés a souvent fluctué sensiblement en raison du contexte politique (rapports avec le POB avant le choix de la neutralité, relations régulièrement tendues avec les communistes au sein du mouvement syndical) et économique (la hausse du chômage avait tendance à faire baisser les effectifs) ou de l’issue victorieuse ou non des conflits souvent durs et longs qui secouaient les entreprises de la région.
La situation des métallos dépendait également de la santé du textile qui recourait à divers métiers de la métallurgie.
Le début du XXe siècle est marqué par deux faits majeurs : sous la poussée des métallos locaux naît la Centrale syndicale de Verviers (1909) puis en 1911, la Fédération nationale des Métallurgistes se transforme en la Centrale des Métallurgistes de Belgique (CMB).
Après la Première Guerre mondiale, en 1921, les trois associations de métallos de Verviers fusionnent puis deviennent la section verviétoise de la Centrale des Métallurgistes de Belgique.
Ce n’est toutefois qu’après la Seconde Guerre mondiale que la FGTB s’étant constituée, se pose la question de l’adhésion des métallos de Verviers à la Fédération des Métallurgistes de la Province de Liège, remise en route par André Renard. Ce qui est finalement réglé à la fin de 1945.
C’est aussi l’époque des premières élections sociales. Les métallos verviétois l’emportent haut la main sauf dans la région d’Eupen, fief chrétien. On notera encore la participation à la grève de 1957 qui avait la reconnaissance du double pécule de vacances comme principale revendication.
L’adoption des thèses renardistes n’était pas toujours bien vue et tendait les rapports entre métallos et la Régionale de Verviers qui prônait des opinions unitaristes. Ce fut particulièrement significatif lors de la grande grève de 1960 contre la Loi Unique. Il faut même question à un moment de l’exclusion des métallos de la Régionale de Verviers mais on n’alla pas jusque-là, les premiers pouvant ainsi continuer à jouer un rôle de minorité agissante au sein de la seconde. Aux Golden Sixties succédèrent ensuite des années de crise dont nous connaissons encore les effets aujourd’hui avec leur cortège de fermetures et de pertes d’emplois.
Avertissement : nous n’avons pas eu la prétention de faire œuvre exhaustive tant ces 125 ans furent riches en événements. Nous nous sommes limités sur ces pages à évoquer quelques faits marquants parmi les plus anciens.
3 questions à … Marcel Bartholomi
Secrétaire régional des métallos verviétois depuis 1976, Marcel Bartholomi est également président de l’interprofessionnelle de la cité lainière depuis 2000.
Rouge Métal : 125 ans de présence syndicale à Verviers, c’est loin d’être un accident de l’histoire…
MB : Bien sûr que non ! La région a toujours été à la pointe du combat de la défense des travailleurs. Et lorsqu’on fête les 125 ans, on est sans doute en deçà de la vérité, puisque d’autres documents – qui nous reviennent parfois avec bonheur- prouvent que la solidarité des travailleurs a débuté bien avant encore. Même si pour l’époque, c’est un peu précipité de parler de « mouvement » en tant que tel. Rappelons également que Verviers est la Ville qui a accueilli la première convention collective de travail !
RM : Parler de Verviers, c’est penser à l’industrie lainière…
MB : … et sa mécanique ! L’essor du textile a permis au secteur métal de se déployer. Pour fabriquer des tissus, il fallait construire et entretenir des machines : on a ainsi vu se développer à Verviers bon nombre d’ateliers mécaniques. Les deux histoires sont étroitement liées. Quand le textile a connu la crise, comme dans les années ’70, le métal s’est aussi pris de sérieux coups. Il a fallu restructurer, se diversifier. Les travailleurs ont parfois voulu sauver leur propre usine, comme en 1981, à la Platinerie Thomson. 25 ans plus tard, la société d’économie sociale Socomef est toujours là. Toutes ces expériences syndicales n’ont pas connu pareille réussite, mais cela prouve que le modèle peut fonctionner, même en cas de conjoncture négative.
RM : Depuis 1976, le monde du travail et l’activité syndicale ont bien changé…
MB : La réalité de terrain n’est effectivement plus la même. La mondialisation a notamment redistribué les cartes. Mais cette nouvelle réalité économique donne encore un peu plus d’importance à la solidarité entre travailleurs, quel que soit son lieu de travail. Il faut avoir une vision plus globale, élargir notre champ d’action. L’arrivée de « techniciens » au sein du syndicat est une très bonne chose au vu de la complexité toujours plus grande des dossiers. Mais la vision politique, qui doit guider le mouvement syndical, doit rester la propriété des militants, de tous les militants. Sans la « base », rien n’est possible. Enfin, et pour bien apprécier la situation à Verviers, il est primordial que la FGTB continue à se démarquer, et des autres syndicats, et du monde politique. Nous ne devons rien à personne. Et cela n’a pas changé depuis 1976, et depuis bien encore avant !
Saviez vous que…
… la première convention collective de travail a été signée à Verviers, le 30 octobre 1906. Cette « convention bilatérale » a été approuvée conjointement par sept patrons et sept représentants des travailleurs, ce qui, pour la première fois, officialisera l’existence et le travail des syndicats. La FGTB de Verviers commémorera l’événement le jeudi 25 octobre : une plaque sera apposée devant le gymnase, à l’endroit où était érigée à l’époque « La Franchimontoise », cercle patronal du textile puis fief du PRL verviétois.
125 ans des métallos verviétois
Samedi 20 octobre - Verviers
(Sur et autour de la Place du Martyr)
De 14 à 16h
Grand jogging de la solidarité
Inscriptions via la délégation syndicale ou le bureau régional
Sur place de 12h30 à 13h30
Tee-shirt offert
Dès 17h30
Concerts
17h30 – Up Stream (années ’80)
Communauté germanophone
19h00 – Women at work (rock)
Copeland
20h30 – Blitz blues band (blues)
Brunswick Marine
22h00 – Catarrhal (métal)
Bodart & Gonay
Entrée : 5 euros (une boisson gratuite)
Gratuit pour les métallos munis de leur carton d’invitation
Infos : 087.33.39.01